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Blogue de Hélène Arsenault


mardi 11 septembre 2012

À découvrir: Grayson, Lamarche, Cazeault

Il s'agit du titre de ma nouvelle chronique de la Teluq pour la rentrée, où je souhaite promouvoir les auteurs de chez nous. Je retranscris ici l'intégralité de ma première chronique littéraire, portant sur:

L'invention de la tribu de Catherine-Lune Grayson
Les têtes rousses de Claude Lamarche
Avéria I et II de Patrice Cazeault

Avis aux intéressés!



L’invention de la tribu, de Catherine-Lune Grayson chez Mémoire d’encrier.

  
Quel délice! Un véritable coup de cœur. J’ai lu ce petit bijou de livre pratiquement en une seule soirée. D’abord il est enlevant, les personnages y sont attachants et les destins croisés si fascinants et exotiques qu’on hésite à le poser avant la fin. Avec ses 170 pages emplies de poésie fine, d’images de pays lointains, ses déserts, ses villages africains ou québécois, ce livre nous transporte dans un univers de sensibilité et de hasards ou la justesse de l’écriture n’a d’égal que l’inventivité narrative.

Un petit extrait pour vous donner le ton :
« Tant que tu ne fais pas partie de l’histoire, tu es épargné. Le paysage n’est qu’un paysage. Ses pics et ses creux, ses arbres et ses roches ne te racontent pas d’histoires. Ils ne sont pas encore marqués, annotés, fêlés, fissurés. Ils sont sans histoire. Dans la préhistoire, tu es épargné.

Dans la préhistoire, il y avait la tribu. Ils allaient vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants. C’était avant qu’ils ne soient tous devenus un peu fous. Avant que le creux, là-bas, ne soit celui des fondations incendiées de la maison blanche. Avant que le vélo rouge ne soit un tas de ferraille. Avant que le bruit des vagues ne soit une marche funèbre. »

L’auteure a grandi à Saint-Adrien, en Estrie. Journaliste, puis travailleuse humanitaire, elle découvre l’Afrique et la poésie du continent. L’invention de la tribu est soin premier roman, bien qu’elle ait déjà publié un récit de voyage accompagné de magnifiques photos et illustrations sous le titre de Nul ne revient du pays qui n'existe pas, chez Michel Brûlé. Grande réussite donc en ce qui me concerne, et j’espère que vous la découvrirez à votre tour.



Les têtes rousses, de Claude Lamarche chez Vents d’Ouest.


Autre belle lecture que ce roman historique nous présentant un pan de l’immigration irlandaise au Québec, avec ses famines, ses exilés vers l’Amérique dans les bateaux-cercueils, ses morts du Typhus et autres, ses quarantaines à Grosse-Île. J’ai été charmée par l’histoire d’amour de Bridget Bushell et les difficultés qu’elle et sa famille ont dû surmonter en arrivant au Québec en mai 1847, après avoir été chassées de leur comté du Roscommon en Irlande. Les têtes rousses décrit l’histoire de Bridget, l’aînée rêveuse, pieuse et obstinée devant assurer la survie de sa famille, de Patrick, le cadet bagarreur et débrouillard qui incarne si bien l’image que l’on se fait de ces immigrants coriaces et enfin de Mary, la plus jeune, la plus sensible, mais qui sait ce qu’elle désire.

Il m’est impossible de ne pas songer à la véracité probable de leurs destins tantôt heureux, tantôt tragiques en lisant que l’auteure, férue de généalogie, est un jour tombée sur un cahier écrit par une aïeule qui lui a fait découvrir l’histoire de ses ancêtres irlandais, et qui lui a servi d’inspiration pour ce livre. Claude Lamarche n’en est pas à ses premières armes en publication et sa belle plume s’efface tout discrètement pour laisser la place à la trame de fond, ce que j’ai particulièrement apprécié.



Avéria tome 1 : Seki et tome 2 : Annika, de Patrice Cazeault chez ADA.

Premier tome de la série jeunesse de science-fiction, Seki se déroule sur Avéria, une colonie humaine occupée par les Tharisiens. Certains humains s’accommodent assez bien de cette occupation depuis près de vingt ans, alors que d’autres rêvent de monter une révolution pour en chasser l’envahisseur. Deux sœurs incarnent ces points de vue diamétralement opposés : Seki, l’aînée, qui étudie en sciences à l’université et qui n’aspire qu’à la paix et la tolérance, tandis que sa jeune sœur, Myr, une adolescente au tempérament  bouillant, prône la violence pour mettre fin à l’occupation et se rebelle contre l’autorité de toutes les façons possibles. Le conflit intense et toujours croissant qui oppose ces deux sœurs tient le lecteur en haleine du début à la fin. Patrice Cazeault mise sur la profondeur des personnages, toujours crédibles et multidimensionnels, et rend avec brio les deux points de vue opposés de ses protagonistes, Seki et Myr, qui se découvrent l'une l'autre dans l’adversité.



Dans le tome 2, Annika, on découvre cette fois l’envers de la médaille, le monde des Tharisiens, des êtres à la peau jaune et visiblement plus avancés technologiquement que les humains, chez qui les aspects politiques et militaires prévalent sur tout. Cette fois nous suivons les méandres de l’esprit tortueux d’Annika Arralia, une Tharisienne colérique (un euphémisme!) qui vit avec son oncle et son cousin. L’un ne pense qu’à son ambition à n’importe quel prix, tandis que l’autre s’abrutit dans la drogue pour oublier son âme de poète qui ne convient pas au destin que lui réserve son père autoritaire. Annika ne trouve que son cousin en qui se confier, et même à ses plus proches amis elle reste fermée et inaccessible. On s’attache toutefois au personnage dont la rage confond et surprend souvent, mais fascine surtout. Pour ma part, j’ai bien aimé Annika pour sa fureur destructrice, sidérée par l’étendue de sa haine, me demandant où tout cela la mènerait. Je m’en voudrais de ne pas mentionner le journaliste hilarant et trop curieux pour son propre bien qui vient pimenter la sauce dans les deux tomes tout en offrant des informations cruciales sur les politiques locales, et sur la censure journalistique. 

Les personnages sont centraux dans ces romans aussi, on arrive presque à oublier que c’est de science-fiction dont il s’agit. À part la présence des Tharisiens, de leurs désintégrateurs qu’on voit très peu à l’œuvre, et des vaisseaux spatiaux, on pourrait transplanter ces histoires sur terre à n’importe quelle époque et l’intensité des émotions transporterait aussi bien le lecteur. Cette particularité aura le don de plaire à un plus grand public, quant à moi j’aurais bien aimé y trouver plus d’éléments de l'imaginaire foisonnant de l'auteur, dont ces deux tomes représentent les premières publications.

Seki et Annika sauront plaire aux jeunes lecteurs comme aux moins jeunes. Le tome 3 d’une série prévue de 6 tomes sera lancé en automne.

Pour suivre l'évolution de la série, il y a le blogue de l'auteur: http://avisdexpulsion.blogspot.ca/ et le site Facebook: https://www.facebook.com/averia.tharisia

5 commentaires:

  1. Oui, j'avais surpris cette critique il y a quelque temps.

    Un grand et vibrant merci, encore une fois :)

    C'est fou comment Annika polarise mon lectorat! Aujourd'hui encore, un lecteur m'a écrit pour me dire qu'il la détestait... et avant ça, Pierre H. me disait que c'était son personnage préféré! Ouf! Situation stressante pour l'auteur!

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  2. En effet, Annika ne laisse pas indifférent! Pour ma part je l'ai plutôt aimée, même si je trouve qu'elle malmène tout le monde autour d'elle -surtout les hommes, qui en redemandent, mais bon, maso il faut croire! LOL.

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  3. Belle chronique ! Merci Hélène. Au plaisir de te lire de nouveau ;)

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  4. Hé hé! tu me ressuscites. En voyant le nom de Lamarche, je me demandais de qui tu parlais!. Merci.

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  5. @Claude: Ça me fait plaisir! C'est pas drôle d'oublier son nom comme ça LOL. Bref ça a passé à la Teluq que je t'ai déjà trouvé quelques nouveaux lecteurs. Ton livre mérite bien d'être mieux connu!

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